lundi 22 août 2011

escapade et expérience




photos prises par delphine, delphine et delphine. Sans doute de piètre qualité, mais j'aime ce qu'elles dégagent...
 Nous avons fait une escapade avec les enfants le week-end du 15 août. Le romantisme des photos ne vous guide-t-il pas sur notre destination? Vraiment?
Si je vous dis Byron... Ah, ça y est! Vous avez saisi. Nous sommes partis en Ferry, histoire de faire rêver les plus jeunes. Balades pas trop loin de Douvres, afin de ne pas perdre un temps précieux en voiture. Sandwich, Canterbury, Leeds, Hastings et Rye ont été de belles découvertes. Si vous demandez aux enfants ce qu'ils ont retenu de leur escapade, ils vous répondront: le bateau, les pirates (tunnels des contrebandiers d'Hastings) et le porridge. Et enfin Colin, le charmant maître d'hôtel qui les a de suite adopté.
J'ai fait une petite expérience sur le chemin de retour de Leeds; je n'en ai pas encore tiré de conclusion définitive.
Nous avons eu la bonne idée de visiter ce château de rêve le matin. Bien nous en a pris: au moment de partir, nous avons croisé des bus entiers qui déversaient des centaines de passagers marqués du logo de Cambridge (sans doute l'université d'été). Le long sentier reliant les parkings au château devait bien faire 3 m de large. Nous avancions, trois de face entrant dans la propriété, un de front se dirigeant vers la sortie. Nous étions de front. Les trois de face occupaient respectivement 2,80m du sentier, les enfants et moi-même avancions en file indienne sur les 20 cm restants. Chaque fois que nous croisions une brochette d'arrivants, nous descendions du sentier pour faire quelques pas dans l'herbe.
Je me suis demandé ce qu'il se passerait si je restais sur mes 20 cm de sentier sans m'écarter. J'ai essayé. J'ai commencé à heurter épaule après épaule, sans discontinuer. Personne ne bougeait ni ne se retournait pour s'excuser. Je marchais, le regard baissé, le pas décidé et bing et bang que je te heurte et te cogne. Pour finir, comme je ne voyais aucun changement dans le comportement de mes vis-à-vis, j'ai recommencé à descendre du sentier dont j'occupais 20 malheureux centimètres pour céder ma place aux autres. Je ressentais de l'amertume envers la condition humaine entière, si symptomatiquement animale. 
Leur comportement s'explique-t-il par le fait qu'ils se sentent plus forts, à trois de front? Ou est-ce le signe que l'indifférence suprême liée à l'individualisme dont notre époque est stigmatisée? Je n'ai pas encore la réponse... Si vous pouviez m'aider, je vous en serais reconnaissante, j'avoue être un peu perdue par rapport à une attitude qui me semble si peu humaine...

vendredi 19 août 2011

Confidences... (variante 2)


Confidences surprises sur mon chemin..
 Mon enfant, mon cher enfant, ce que j'ai à te dire n'est pas facile à exprimer, mais mon rôle de mère m'oblige à tenir ces propos. Si tu savais comme je t'aime! Mon amour pour toi m'a toujours encouragée à prendre ta défense, quelles que soient tes faiblesses et tes agissements. J'ai affronté le courroux de ton père, j'ai essuyé le venin des harpies du village, j'ai vendu des bijoux que je tenais de ma propre mère afin de payer tes dettes de jeu. Mais il y a une chose que je ne puis tolérer, c'est que tu entaches la réputation d'une jeune fille. Alors, agis en conséquences, ou tu ne pourras plus compter sur mon soutien.

Confidences... (variante)

Confidences surprises sur mon chemin...
Pardonnez ma tenue, Madame. C'est miracle si j'ai pu échapper aux rebelles. Voyez, il ne me reste qu'un drap pour me vêtir. Si je viens vers vous sans même prendre le temps d'endosser une tenue décente, c'est, Madame, afin de vous dire que votre fils bien-aimé, mon ami, est un héros. Sans lui, je ne serais pas à vos côtés. Je serais sans doute allongé dans une quelconque rigole charriant eau souillée, larmes salées et sang versé.
Madame, ce que j'ai à vous dire... ce que je dois vous transmettre...
Tremblez! pleurez! Les mots ne peuvent franchir le seuil de mes lèvres raidies par la souffrance.  Mais vous savez, n'est-ce-pas? Alors unissons nos peines et portons sa mémoire avec dignité.

Confidences

Confidences surprises en chemin...

Séchez donc vos larmes, ma Mie, ma Douce, mon Ame. Nous n'avons rien à nous reprocher. Rien ne sert de battre sa coulpe; calmez-vous, ma Vie, votre pouls, cheval affolé, s'emballe. Rentrez donc ces soupirs, rangez cette mèche folle qui éteint votre regard. Votre main tremble, permettez que j'y pose mes lèvres, que je vous réchauffe encore une fois. Allons-nous-en, quittons la ville, les devoirs corsetés, les rumeurs et les humeurs de votre père. Le monde nous tend les bras, courons vers la lumière.

mardi 16 août 2011

A quoi bon...

A quoi bon raconter les souvenirs qui me hantent, l'émotion qui m'étreint avec tant de force que j'étouffe parfois, les joies qui me font pleurer et les peines qui me dessèchent, les parfums qui tournoient et les couleurs qui chantent -les entendez-vous ?
Avant, les billets se bousculaient dans ma tête, n'attendant que le bon vouloir de mes dix doigts pour prendre forme. Leurs sujets étaient souvent insignifiants, émanant du quotidien, le mien. Mais ils étaient un lien, sans doute ténu, entre vous et moi. Ils nous ont permis de nous apprivoiser, de nous découvrir sous différentes facettes, pour finir par nous connaître mieux que nous ne connaissons certains de nos proches.
J'ai eu la chance de rencontrer quelques amis blogueurs, toutes d'agréables surprises.
"Tu devais avoir cette voix-là", me dit Célestine en franchissant le pas de notre porte. Cela m'a fait sourire. Les mots seraient-ils les messagers de notre voix?
Alors, pour ça, pour maintenir le fil et le consolider, pour lire votre voix et entendre battre votre coeur, j'ai décidé de continuer à publier quelques petits riens, encore et encore...

mercredi 3 août 2011

Lectures: "Murambi, le livre des ossements" Boubacar Boris Diop et "Une enfance africaine" de Stéphanie Zweig

photo trouvée quelque part sur la toile

Les vacances sont synonymes de repos, de découvertes, de parfums inédits, de saveurs nouvelles, de lectures. Comme je m'en voulais de n'avoir pas pris le temps de préparer celles-ci! Je fis donc confiance au présentoir de la bibliothèque. Ce furent de bonnes surprises.
Le roman d'Antonio Munoz Molina me tomba cependant assez rapidement des mains, tant je ressentais de frustration à le lire dans sa traduction.
Siri Hustvedt, avec "tout ce que j'aimais" est resté en attente.

J'ouvris "Murambi, le livre des ossements" de Boubacar Boris Diop pour ne plus le refermer. J'ai cependant été tentée de le laisser à plusieurs reprises, tant certains passages en étaient éprouvants. Ils l'étaient davantage par l'évocation que par la description. Évocations chantées, criées, marmonnées par ces victimes du génocide rwandais, toutes blessées dans leur chair, dans leur coeur, dans leur intelligence ou dans leur âme. Mais en filigrane on décèle une étincelle d'espoir, résumée par un sage du livre des ossements:

"C'est bien de se rappeler certaines choses. Cela aide parfois à trouver son chemin dans la vie. (...) On sait quelles épreuves il a fallu surmonter pour mériter de vivre. On sait d'où on vient."
Et l'auteur dans sa post-face:

"Le devoir de mémoire est avant tout une façon d'opposer un projet de vie au projet d'anéantissement des génocidaires et le romancier y a son mot à dire."
J'ai continué à parcourir les chaudes terres africaines en compagnie de Regina Redlich. Regina est une enfant juive allemande, contrainte de fuir cet autre génocide. refugiée au Kenya avec ses parents, elle évoque son attachement à cette terre d'accueil qu'elle aura immédiatement dans la peau. De la première page à la dernière, l'auteure de cette autobiographie nous entraîne dans une ronde d'images et de métaphores plus savoureuses les unes que les autres, nous plongeant au coeur de l'âme africaine. ce livre est un chant, un chant d'amour où la vie est magie et sagesse tout ensemble.

"Une enfance africaine" de Stépahie Zweig

"-Tu me donnes ton manteau, Bwana?
-Ce n'est pas un manteau, c'est une robe. Un homme comme toi doit porter une robe.
Owuor essaya aussitôt de prononcer le mot nouveau. Comme il ne venait pas de la langue des Jaluo et que ce n'était pas non plus un mot swahili, sa bouche et sa gorge éprouvèrent de grosses difficultés. La memsahib et l'enfant se mirent à rire. Rummler ouvrit lui aussi une large gueule, mais le bwana qui avait envoyé ses yeux en safari était comme un arbre trop petit encore pour abreuver sa cime à la fraîcheur de vent.
-Robe, dit le bwana, il faut répéter le mot souvent et tu sauras le prononcer aussi bien que moi.
(...)-Owuor, c'était ma ma robe avant que je devienne un bwana. Je portais la robe à mon travail.
-Robe, répéta Owuor, heureux que le bwana ait enfin compris qu'il fallait dire deux fois les mots agréables."

"Quand le bwana parlait de la guerre, il parlait aussi toujours de son père. Alors, il ne regardait jamais Kimani; il tournait ses yeux vers la haute montagne, mais il ne voyait ni le sommet, ni la neige. Il parlait avec la voix d'un enfant impatient qui veut avoir la lune le jour et le soleil la nuit, et il disait:
-Mon père meurt.
Ces paroles étaient aussi familières à Kimani que son propre nom et, même s'il se donnait beaucoup de temps avant d'ouvrir la bouche, il savait ce qu'il avait à dire. Il demandait:
-Ton père veut mourir?
-Non, il ne veut pas mourir.
-Un homme ne peut pas mourir s'il ne le veut pas, répondait Kimani à chaque fois.
Au début, il avait montré ses dents en parlant, comme il le faisait toujours quand il était heureux; pourtant, avec le temps, il avait pris l'habitude de faire sortir un soupir de sa poitrine. Ça le tracassait que son bwana, un homme qui savait tant de choses, ne soit pas assez intelligent pour comprendre que la vie et la mort n'étaient pas l'affaire des humains, mais seulement celle du puissant dieu Mungo.
Plus encore que les journaux, avec leurs images de maisons détruites et d'hommes morts, il voulait que son bwana lui montre des lettres. A l'arrivée du bwana à la ferme, il croyait qu'une lettre était semblable à une autre lettre. Maintenant, il n'était plus aussi bête. Elles n'étaient pas comme deux frères sortant ensemble du ventre de leur mère. Les lettres étaient comme des hommes, jamais pareilles.
Ça dépendait des timbres. Une lettre qui n'en avait pas n'était qu'un morceau de papier et ne pouvait pas partir en safari, même un tout petit. Un timbre seul, avec l'image d'un homme aux cheveux clairs et au visage de femme, parlait d'un voyage que l'on pouvait faire avec ses pieds. C'était le genre de lettres que Kimani rapportait souvent de la duka de Patel. Elles venaient de Gilgil et c'étaient les lettres du bwana qui faisait danser son gros ventre quand il riait et qui avait une memsahib qui chantait mieux qu'un oiseau. (...)
Kimani savait qui avait écrit la lettre avant que le bwana le lui dise. Les yeux de son bwana brillaient comme de jeunes fleurs de lin quand les lettres étaient de la petite memsahib et sa peau ne sentait jamais la peur. (...) Et il y avait un timbre qui, à lui seul, était capable, plus que tous les autres ensemble, de mettre le bwana en feu. (...) Kimani aimait regarder longuement ce dernier timbre. L'homme paraissait vouloir parler et avoir une voix capable de rebondir avec force contre la montagne. Dès que le bwana apercevait ce timbre, ses yeux devenaient des trous profonds et il devenait aussi raide qu'un homme qui a oublié comment on se défend et qui se retrouve en face d'un voleur fou de colère qui le menace d'une panga fraîchement effilée."